Un nouveau succès du modèle cosmologique standard

L’analyse conjointe des dernières données du satellite Planck et des propriétés des très grands catalogues de galaxies collectés par le télescope Sloan confortent le modèle d’univers en expansion accélérée et dont l’essentiel de la matière est sous forme de matière noire froide. Il s’agit du modèle « ΛCDM », intégré à la théorie du Big Bang. Telle est la conclusion des travaux de deux chercheurs de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP/OMP) et du laboratoire Astroparticule et cosmologie (APC) publiés dans Astronomy & Astrophysics.

Le modèle du Big Bang connaît de nombreux succès depuis plus de quarante ans, comme le rappelait Jim Peebles en 2019 dans son allocution lors de la cérémonie de remise du prix Nobel de physique : deux grands ensembles de données permettent de nombreux tests. Il s’agit d’une part des mesures des fluctuations du fond cosmologique qui avec le satellite Planck ont atteint une précision remarquable permettant d’affiner considérablement la caractérisation de l’univers quand celui-ci n’était âgé que de 370 000 ans. Et d’autre part, des mesures de la distribution de la matière issues de l’ensemble des observations collectées par le télescope Sloan.

Le télescope Sloan opère depuis le sol
Le télescope spatial Planck

Malgré le remarquable accord de ces données avec les prédictions du modèle « ΛCDM » d’univers dominé par une matière noire froide et en expansion accélérée, il subsiste deux ombres au tableau.
La première concerne la mesure de la constante de Hubble. Les valeurs obtenues par des mesures au sein de l’univers local indiquent des valeurs 5 à 10% plus grandes que celles qui se déduisent des observations fournies par Planck et indépendamment des mesures obtenues sur le télescope Sloan. Cela représente un désaccord qui est « significatif à environ 5 sigmas », c’est à dire un événement qui a 0.000057 % de chance d’arriver.
La seconde, est aussi un désaccord de l’ordre de 5 à 10%, et concerne l’amplitude des variations de la densité de matière mesurée par Planck avec une précision de 1 à 2 % quand l’univers était âgé de 370 000 ans. Or les mesures de cartographie de la matière noire peuvent s’obtenir par l’observation des effets de lentilles gravitationnelles, une méthode dont le relevé du téléscope Canada-France-Hawaï fut un des pionniers. De telles mesures, provenant de l’univers « actuel », indiquent des valeurs nettement inférieures à celles déduites des observations de Planck.
Une autre indication, elle-même issue des données du satellite Planck, concerne l’abondance des amas de galaxies. Planck avait en effet la capacité de recenser ces objets dans l’univers actuel. Or compte tenu des masses estimées, le nombre d’amas observé est entre deux et quatre fois plus faible qu’attendu, ce qui pourrait s’expliquer si l’amplitude des variations de la densité de matière était de quelques 10%. Ceci représente donc une « tension » située aux environs des « 5 sigmas ».

Récemment l’ensemble des résultats obtenus à partir des données du téléscope Sloan a été rendu publique et confirme que la distribution des galaxies est en très bon accord avec le modèle « ΛCDM ». Ils fournissent de plus une information sur la dynamique des grandes structures qui dépend de l’amplitude des variations de la densité de matière. Mais malheureusement ces dernières mesures en elles-mêmes ne permettent pas de trancher le débat du fait de l’incertitude sur les autres paramètres cosmologiques.
Toutefois, il est possible d’utiliser ces données de façon conjointe, à travers une méthode qui permet parfois de gagner en précision plus qu’on ne pourrait l’attendre d’une simple combinaison statistique des contraintes finales. C’est précisément cette méthode qu’ont appliquée deux chercheurs de l’IRAP et de l’APC, en utilisant de façon combinée les données du téléscope Sloan et du satellite Planck. Le résultat final est alors très précis et en très bon accord avec l’amplitude des variations de la densité de matière déduites de données de Planck dans le modèle « ΛCDM ». Ceci implique incidemment que les masses des amas de galaxies ont été largement sous-estimées par le passé. Ce résultat, basé sur une méthode nouvelle, est une surprise car il est à rebours des analyses précédentes.

Ressources complémentaires

Contact IRAP

  • Alain Blanchard, alain.blanchard@irap.omp.eu

Plus d'actualités

Vénus perd de l’oxygène et du carbone dans l’espace

Vénus, contrairement à la Terre, ne possède pas de champ magnétique intrinsèque. En conséquence, le vent solaire interagit directement avec son atmosphère, accélérant des particules chargées qui peuvent s’échapper dans […]

MIRS : départ pour le Japon

MIRS, petit instrument d’une dizaine de kilos seulement, est un véritable bijou de technologie mis au point en seulement 4 ans. Développé collectivement par le CNES, le LESIA, le LAB, […]

Jupiter et Saturne: un nouveau modèle théorique des magnétosphères géantes

Les planètes géantes du Système Solaire sont des systèmes d’une extrême complexité. Elles sont caractérisées d’abord par leur champ magnétique très intense, qui crée une cavité magnétique protectrice du vent […]

Rechercher