La lune Ganymède a ses propres ceintures de radiations !

Les planètes ayant un champ magnétique suffisamment fort piègent autour d’elles des particules chargées de haute énergie dans leurs « ceintures de radiations ». Pour mieux comprendre les mécanismes de formation de ceintures de radiations planétaires, une équipe regroupant des chercheurs de l’IRAP (CNRS – INSU) et des chercheurs de l’université de Californie à Berkeley (Space Sciences Laboratory) s’est tournée vers la lune Ganymède en orbite autour de Jupiter. Ganymède possède un champ magnétique suffisant pour créer une mini magnétosphère imbriquée dans celle de Jupiter, mais peut-elle avoir ses propres ceintures de radiations ? La collaboration IRAP – Berkeley sur ce sujet a été rendu possible par le fonds France – Berkeley.

Les chercheurs se sont concentrés sur les mesures acquises par la sonde Galileo de la NASA lorsqu’elle survola Ganymède le 20 Mai 2000. Les observations d’électrons énergétiques de Galileo ont été réanalysées par l’IRAP et montrent que les flux de particules sont maximum dans la direction perpendiculaire au champ magnétique local. Ce type de distribution est appelé « pancake ». Les données de Galileo ont ensuite été confrontées à des simulations numériques conduites par Berkeley.

La confrontation données – simulations montre que les pancakes d’électrons observés par Galileo proviennent d’électrons piégés autour de Ganymède ! Cela confirme l’existence suspectée depuis plus de 20 ans de ceintures de radiations autour de la lune glacée.

Les simulations nous renseignent alors sur l’origine et la stabilité des ceintures de radiations de Ganymède. Les particules sont tout d’abord injectées depuis la magnétosphère de Jupiter dans la mini-magnétosphère de la lune. Elles effectuent ensuite en moyenne 3 à 4 orbites avant d’impacter la surface glacée ou de retourner dans la magnétosphère de la planète géante. La vitesse des particules piégées autour de Ganymède est régie par deux mécanismes principaux : la conservation d’invariants adiabatiques – phénomène classiques des ceintures de radiations planétaires – et l’effet d’accélération ou de décélération lié aux champs électriques internes à la mini-magnétosphère de la lune.


Trajectoire simulée d’un des électrons observés par Galileo à la position repérée par l’étoile rouge. Les quatre panneaux montrent les quatre orbites que la particule effectue autour de Ganymède avant de retourner dans la magnétosphère de Jupiter. Credit : Liuzzo et al. (2024), https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2024GL109058

Cette réanalyse des données anciennes de Galileo nous renseigne sur ce que va pouvoir explorer la mission JUICE de l’ESA en route vers le système de Jupiter. JUICE se placera sur une orbite polaire basse autour de Ganymède en 2033. Elle dressera alors une cartographie 3D complète des ceintures de radiations de la lune glacée et étudiera les processus physiques sous-jacents en détail pour mieux comprendre cet objet astrophysique découvert par Galileo en l’an 2000.

Ressource complémentaire

Contact IRAP

  • Quentin Nénon, quentin.nenon@irap.omp.eu

Plus d'actualités

La mission SVOM, destinée à l’étude des plus lointaines explosions d’étoiles, passe en phase opérationnelle

La phase de vérification de cette mission spatiale franco-chinoise, consacrée notamment à la détection et à l’étude des sursauts gamma, s’est achevée avec des premiers résultats très prometteurs. Fruit d’une […]

Régime de choc avec cuisson basse-temperature pour LEES : bien secouer avant de servir chaud !

Le modèle mécanique et thermique (STM) de l’instrument Low-Energy Electron Spectrometer (LEES), dont l’IRAP est responsable, vient de passer avec succès une série de tests environnementaux (température, vibrations et chocs) […]

LA SULFUREUSE IO, OBJET DE TOUTES LES ATTENTIONS !

L’étude du Système de Jupiter et de l’évolution de ses lunes vers l’habitabilité est au cœur de la mission étendue de Juno (NASA), et de la préparation de la mission […]

Rechercher