Un instrument co-développé par un chercheur toulousain détecte des vents records à 33 000 km/h sur une exoplanète

A plus de 500 années-lumière de la Terre, des rafales de vent ont été flashées à 33 000 km/h sur l’exoplanète WASP-127b. Ce sont les bourrasques les plus rapides jamais mesurées sur une planète. Une prouesse technique rendue possible grâce à un spectrographe co-développé par Alexis Lavail, chercheur à l’Université de Toulouse au sein de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP – CNES/CNRS/UT). Cette avancée, publiée dans Astronomy & Astrophysics le 21 janvier, pourrait permettre de mieux comprendre les dynamiques climatiques et chimiques des planètes.

Artist’s impression of supersonic winds on WASP-127b

Située à 520 années-lumière de la Terre, l’exoplanète WASP-127b est pleine de surprises. C’est une géante gazeuse, légèrement plus grande que Jupiter mais beaucoup moins massive, ayant la particularité d’orbiter à proximité immédiate de son étoile : elle en est plus proche que Mercure du Soleil dans notre système solaire. « Des différences de température entre les pôles et les côtés de l’exoplanète, durant ses matins et ses soirs, suggèrent une dynamique climatique sophistiquée », explique Alexis Lavail. 

Son atmosphère complexe en fait alors un sujet d’intérêt pour les astronomes, qui ont pu y mesurer des vents allant jusqu’à 33 000 km/h. Sur Terre, la rafale de vent la plus forte jamais enregistrée était 80 fois moins puissante (407 km/h). Dans notre système solaire, les vents les plus rapides sont ceux de Neptune, mesurés à plus de 1 700 km/h (18 fois moins forts que ceux de WASP-127b).

Cette découverte a été rendue possible grâce à l’instrument CRIRES+ au Very large telescope (VLT) de l’Observatoire européen austral (ESO) au Chili. « Il fait partie des meilleurs instruments au monde pour caractériser les atmosphères d’exoplanètes » détaille l’astronome toulousain, qui a participé à la conception et l’exploitation scientifique de CRIRES+. « C’est un spectrographe en service depuis fin 2021 qui permet d’analyser très finement la lumière dans le proche-infrarouge. » Lorsque WASP-127b passe devant son étoile, la lumière de cette dernière traverse l’atmosphère de l’exoplanète qui va lui « imprimer » une signature avant de parvenir au spectrographe. Les molécules présentes dans l’atmosphère absorbent différemment la lumière, retenant certaines longueurs d’ondes au détriment d’autres. C’est à partir de ces signatures lumineuses que le spectrographe peut en déduire la composition exacte de l’environnement de WASP-127b.


 Les scientifiques de l’étude ont identifié la présence de vapeur d’eau et de monoxyde de carbone. Pour Fei Yan, co-auteur de l’étude et professeur à l’Université des sciences et technologies de Chine, « cela montre que l’exoplanète a des régimes climatiques complexes, tout comme la Terre et d’autres planètes de notre système. » Or, les scientifiques ont constaté un décalage dans le spectre des raies d’absorption des molécules d’eau et de monoxyde de carbone, permettant d’en déduire qu’elles sont soufflées par des vents puissants.

C’est la très bonne résolution de l’instrument combinée au grand diamètre du télescope qui nous permet de détecter des molécules dans des atmosphères d’exoplanètes ainsi que de pouvoir étudier leur dynamique, explique Alexis Lavail.

Les calculs ont indiqué que les molécules se déplaçaient à une vitesse de 9 km/s, soit 33 000 km/h de part et d’autre de l’équateur de WASP-127b. Ces observations sont proches de celles que l’on peut faire sur Terre des courants-jets (ou jet streams) mais dans des proportions gigantesques.

Cette avancée souligne les progrès dans l’étude des exoplanètes, grâce auxquels les scientifiques peuvent désormais explorer en détail les climats et atmosphères de ces mondes lointains. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives sur la compréhension des mécanismes de formation des planètes et des processus climatiques dans notre propre système solaire. À l’avenir, de nouveaux télescopes comme l’Extremely large telescope de l’ESO et son instrument ANDES permettront de poursuivre cette recherche et d’analyser des exoplanètes plus petites et rocheuses avec une plus grande précision.

Ressources complémentaires

Contact IRAP

  • Alexis Lavail, alexis.lavail@irap.omp.eu

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