Du quartz découvert pour la première fois sur Mars par le robot Perseverance, qui atteste d’anciennes circulations d’eau sur la planète rouge

Une équipe de recherche internationale associant de nombreux laboratoires français (1) dont l’Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (OSUG – CNRS/UGA), l’Institut de minéralogie, de physique des matériaux et de cosmochimie (CNRS/MNHN/Sorbonne Université), le Laboratoire de géologie de Lyon (CNRS/ENS Lyon/Univ. Claude Bernard/UJM Saint-Etienne) et l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (CNRS/CNES/Université de Toulouse) vient de détecter grâce au rover de la NASA Perseverance, des roches qui témoignent d’anciennes circulations d’eau. Cette découverte a été publiée dans la revue Earth and planetary science letters le 28 février 2025.

Depuis 4 ans, le rover Perseverance arpente la surface de Mars, avec pour objectif de comprendre la géologie du cratère d’impact Jezero, et d’échantillonner des roches bien choisies dans la perspective d’un retour sur Terre. Après avoir étudié les roches magmatiques du fond du cratère et les dépôts sédimentaires d’un ancien delta déposé par-dessus, le rover a grimpé sur les remparts du cratère. C’est alors qu’une série de roches de compositions chimique et minéralogique très particulières ont été trouvées. Elles témoignent d’une interaction eau-roche datant du tout début de l’histoire de Mars.

Cette découverte a été réalisée par une équipe scientifique internationale grâce à l’ensemble instrumental SuperCam (2). SuperCam a ainsi pu identifier des roches très riches en silice, et composées de différentes formes de silice : de l’opale (connue sur Terre pour ses propriétés iridescentes), de la calcédoine (une forme de quartz a cristaux très petits), et enfin du quartz parfaitement cristallisé. Si le quartz est commun dans la croûte Terrestre, c’est la première fois que ce minéral est identifié directement à la surface de la planète rouge, et ce grâce à la spectroscopie Raman déployée par SuperCam. Pour dissoudre et précipiter de la silice, l’existence de processus hydrothermaux peut être proposée, ceux-ci étant fréquents sur Terre sur les bords de cratères d’impact. L’énergie apportée par la cratérisation et la déformation associée permettent un apport de chaleur, favorisant la circulation de fluide au sein des roches fracturées.

Image obtenue par SuperCam de la roche « Emmons Glacier » (gauche) et Spectre Raman mesuré sur cette cible (en rouge) et comparé à un spectre de quartz hydrothermal mesuré au laboratoire (en noir). Celui-ci indique sans ambiguïtéla présence de quartz. Crédits : NASA/JPLCaltech/LANL/CNES/CNRS

Ces roches témoignent donc de très anciennes circulations d’eau sur Mars et sont intéressantes d’un point de vue exobiologique. Les roches siliceuses, et en particulier l’opale, ont des capacités remarquables à préserver des traces de vies qu’elles soient morphologiques ou moléculaire. Si Perseverance arrive à échantillonner ce type de roches, elles seront des cibles de choix pour rechercher des signatures du vivant une fois ramenées sur Terre.

« Nous démontrons avec cette publication la présence de différentes phases de silice, et c’est la première identification depuis la surface de Mars d’un minéral « iconique », le quartz, avec le plus beau spectre « Raman » jamais mesuré ailleurs que sur Terre, presque 100 ans après la découverte de la technique. Nous avons aussi détecté d’autre formes de silice : de l’opale et de la calcédoine. Tout cela met en évidence un très ancien système hydrothermal, et ces roches sont particulièrement intéressantes d’un point de vue exobiologie car la silice est un matériau très efficace pour préserver des signatures du monde vivant », commente Pierre Beck, professeur à l’Université Grenoble Alpes (UGA) effectuant ses recherches au sein de l’IPAG.

« Observer en surface de Mars les traces d’un ancien système hydrothermal lié à un cratère d’impact est particulièrement remarquable, car les environnements hydrothermaux sont parmi les principales cibles pour la recherche de vie microbienne dans le Système Solaire. La surface de Mars est criblée d’impacts : il est tout à fait possible que des environnements similaires puissent avoir été assez communs sur la planète rouge », rajoute Lucia Mandon, postdoctorante du Centre national d’études spatiales (CNES), effectuant également ses recherches à l’IPAG.

Notes

  1. Laboratoire Atmosphères, Milieux, Observations Spatiales (LATMOS-IPSL/CNRS / Sorbonne Univ / UVSQ) ; Institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP – OMP – CNRS/CNES/Univ.Toulouse III Paul Sabatier) ; Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (IPAG – OSUG -CNRS / UGA) ; Laboratoire d’astrophysique de Marseille (LAM – CNRS/CNES/Aix Marseille Université) ; Laboratoire de géologie de Lyon : Terre, Planètes, Environnement (LGL-TPE – OSUL -CNRS/ENS Lyon/Univ. Claude Bernard/UJM Saint-Etienne) ; Laboratoire d’instrumentation et de recherche en astrophysique (LIRA – Obs de Paris-PSL/CNRS /Sorbonne Univ/Univ Paris Cité ) ; Institut d’Astrophysique spatiale (IAS – CNRS/Univ. Paris Saclay) ; Institut de Minéralogie, de Physique des Matériaux et de Cosmochimie (IMPMC – CNRS/MNHN/Sorbonne Univ) ; Laboratoire de Planétologie et Géosciences de Nantes (LPGN – CNRS/Univ. Nantes)
  2. Cet ensemble instrumental très innovant a été développé conjointement par un consortium de laboratoires français mené par l’IRAP (Toulouse, France), par le LANL (Los Alamos, USA), et avec une contribution de l’Université de Valladolid (Valladolid, Espagne). Le CNES est responsable, vis-à-vis de la NASA, de la contribution française à SuperCam. Le CNES, le CNRS et de nombreuses universités ont apporté des ressources humaines pour la fourniture de cet instrument, et l’instrument est opéré en alternance par l’équipe européenne au travers du centre de contrôle installé au CNES à Toulouse (FOCSE Mars 2020), et par l’équipe américaine depuis le LANL.

Ressources complémentaires

Contacts IRAP

  • Olivier Forni, olivier.forni@irap.omp.eu
  • William Rapin, william.rapin@irap.omp.eu
  • Pierre-Yves Meslin, pierre-yves.meslin@irap.omp.eu
  • Sylvestre Maurice, sylvestre.maurice@irap.omp.eu
  • Olivier Gasnault, olivier.gasnault@irap.omp.eu
  • Agnès Cousin, agnes.cousin@irap.omp.eu

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