Détection de taches sur la surface de l’étoile de masse intermédiaire Vega

Détection de taches sur la surface de l’étoile de masse intermédiaire Vega

Pour la première fois une équipe internationale de scientifiques a pu mettre en évidence l’existence de taches sur la surface de l’étoile de masse intermédiaire Vega. Ce résultat inattendu amène de nouvelles contraintes importantes sur l’évolution stellaire des étoiles de masse intermédiaire et plus particulièrement les mécanismes de génération de leurs champs magnétiques et ouvre une fenêtre vers des informations auparavant inaccessibles. Ces travaux impliquent des laboratoires français : l’institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP – CNRS/Université Paul Sabatier Toulouse III) qui a mené les recherches et l’institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (IPAG – CNRS/Université Joseph Fourier). Ils sont publiés dans la revue Astronomie et Astrophysique du 6 mai 2015.

vega

Signatures de taches dans le spectre dynamique de Vega. Le profil de la raie spectrale s’étend entre les deux traits verticaux extrêmes. Chacun des 2500 spectres différentiels (les spectres moins leur moyenne) est replacé à la phase résiduelle. © ESO

Vega de la Lyre est une étoile de l’hémisphère nord très brillante et bien connue par les astronomes. Avec 2 masses solaires elle se place dans la catégorie des étoiles de masse intermédiaire. Sa température de surface est de l’ordre de 10000°C. C’est une étoile de classe spectrale A. Elle tourne très vite sur elle-même, sa période de rotation étant proche de 0.68 jours terrestres. Cette étoile est une référence de stabilité pour les mesures de flux lumineux depuis plus de 150 ans. Ainsi, même si quelques variations de très faible amplitude avaient été rapportées dans le passé, aucune périodicité n’avait pu être mise en évidence.
En 2009, un champ magnétique très faible a été détecté sur Vega (voir la Nouvelle de l’INSU du 18/06/2009) et par la suite aussi sur d’autres étoiles de la même classe spectrale (A). Alors que le champ magnétique du Soleil est engendré par un mécanisme dynamo dans son enveloppe convective, l’origine de ces champs magnétiques à la surface d’étoiles qui n’ont pas d’enveloppe convective telles que Vega est un mystère. Une des caractéristiques de la dynamo solaire est sa variabilité temporelle qui se manifeste notamment par l’apparition et la disparition des taches solaires. Des structures similaires sont-elles présentes à la surface de Vega et peuvent-elles nous apporter des indices quant à l’origine de son champ magnétique ? Des travaux récents effectuées avec le satellite Kepler1 l’ont suggéré grâce à la détection, dans environ 40% des étoiles A, d’une modulation rotationnelle du flux lumineux (photométrie), c’est-à-dire une variation en phase avec la période de rotation de l’étoile.
L’équipe de scientifiques a cherché des traces directes d’une telle modulation. Pour ce faire, elle a étudié un jeu récent de données de 2500 spectres à haute résolution et grande stabilité vélocimétrique (observations dans le domaine du visible avec SOPHIE/OHP2 en 2012). Chacun des spectres, obtenu à un moment précis connu, contient des centaines de raies spectrales contribuant (en fonction de leur intensité) à un profil de raie moyenné (une sorte de profil type). Les 2500 spectres ont tous été obtenus à différents moments d’acquisition et l’évolution des profils spectraux respectifs est alors étudiée dans le temps.
Les écarts au profil de raie spectral moyen de toute la série ont été identifiés, ce qui a permis aux chercheurs d’en extraire des signatures de taches sur la surface de l’étoile (voir figure ci-dessous). La vélocimétrie est au cœur de ces recherches et permet de déterminer avec une extrême précision les mouvements propres des étoiles, mais aussi à travers l’analyse du profil spectral le mouvement propre et les écarts de brillance de certaines plages  à leur surface.
Ainsi avec Vega, pour la première fois et grâce à la qualité exceptionnelle des données, les chercheurs ont mis en évidence une structuration de la surface présentant des plages brillantes ou sombres (à un très faible contraste) sur cette étoile de masse intermédiaire caractéristique de sa classe spectrale (A). Ces plages sont surtout localisées à des latitudes assez basses proche de l’équateur stellaire.
Cette découverte indique que ces mêmes étoiles ont une activité magnétique complexe. De plus, elle ouvre une toute nouvelle fenêtre d’observation. En effet, un grand nombre d’informations supplémentaires sur les conditions physiques des étoiles A sont maintenant accessibles : rotation stellaire, activité magnétique de surface et structure interne. Ainsi Vega, malgré les nombreuses études qui lui ont déjà été consacrées, nous offre encore des résultats passionnants !

Notes

1 Kepler est un télescope spatial développé par l’agence spatiale américaine, la NASA, pour détecter des exoplanètes et lancé en 2009. Le satellite utilise la méthode des transits en observant les étoiles à l’aide de son télescope de 0,98 mètre de diamètre.
2 Spectrographe pour l’observation des phénomènes des intérieurs stellaires et des exoplanètes, Observatoire de Haute Provence.

Ressources complémentaires

Contacts IRAP

  • Torsten Boehm, Torsten.Boehm@irap.omp.eu
  • François Lignières, Francois.Lignieres@irap.omp.eu
  • Pascal Petit, pascal.petit@irap.omp.eu
  • Frédéric Paletou, frederic.paletou@irap.omp.eu
  • Hervé Carfantan, herve.carfantan@irap.omp.eu

Auteur : CNRS INSU

Date : 06/05/20152015/05/06

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