Découverte d’un deuxième nuage de gaz autour de Jupiter par la sonde Galileo

L’analyse des protons énergétiques observés par la sonde américaine Galileo de 1995 à 2003, avait permis de détecter un nuage relativement fin d’oxygène entourant Jupiter au niveau de l’orbite de la lune glacée Europe. L’existence d’un deuxième nuage de gaz, plus large et constitué d’hydrogène, vient d’être révélée grâce aux mesures de Galileo d’une autre espèce énergétique : les ions soufre. Réalisée par deux chercheurs de l’Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie de Toulouse (IRAP-OMP, CNRS/UT3 – Paul Sabatier/CNES), cette découverte a été publiée dans la revue Geophysical Research Letters.

Densités de particules neutres des nuages d’hydrogène (H) et d’oxygène (O) d’après le modèle théorique publié en Janvier 2019 par Todd Smith et ses collègues dans la revue The Astrophysical Journal. Jupiter est au centre et Europe est à droite à 10 rayons joviens. L’épaisseur verticale simulée selon l’axe Z du nuage d’hydrogène (H) est beaucoup plus grande que celle du nuage d’oxygène (O). Nous avons détecté cette caractéristique grâce aux mesures de protons et ions soufre énergétiques de Galileo. Ainsi, les mesures de particules valident le modèle théorique de Todd Smith et ses collègues. Inversement, leur modèle renforce notre interprétation des mesures.

L’espace proche de l’orbite d’Europe autour de Jupiter n’est pas vide mais contient des particules neutres regroupées dans un nuage, peut-être créé par l’érosion de l’atmosphère ténue de la lune ou des geysers. Ces particules neutres ne peuvent être étudiées qu’indirectement à travers l’effet qu’elles ont sur les ions énergétiques des ceintures de radiations de Jupiter. En 2003, les chercheurs ont mis en avant l’existence du nuage d’Europe en s’intéressant aux mesures de protons. Etonnamment, aucune signature du nuage ne fut trouvée pour les ions soufre à l’époque. Diverses hypothèses furent avancées pour expliquer cette incohérence qui peut remettre en doute l’existence même du nuage.

Récemment, les données des ions soufre relevées il y a plus de quinze ans grâce à la sonde américaine et son instrument de mesure de particules énergétiques, ont été de nouveau analysées en adoptant une nouvelle approche : là où l’étude de 2003 s’est intéressée à des orbites pendant lesquelles Galileo était à haute latitude, les prédictions théoriques de l’effet du nuage nous indiquent qu’il faut se concentrer sur les orbites à faible latitude, au plus près de l’équateur. Les signatures attendues ont été alors découvertes dans les mesures d’ions soufre, ce qui confirme l’existence des particules neutres. De plus, la caractérisation du nuage à partir de deux espèces énergétiques différentes permet d’affirmer que ce n’est pas un nuage qui a été détecté, mais deux : un nuage fin d’oxygène révélé par les protons et un nuage épais d’hydrogène montré par les ions soufre.

Cette découverte va avoir un impact direct et immédiat sur les opérations scientifiques en cours autour de Jupiter. En effet, les équipes scientifiques de la sonde américaine Juno, actuellement en orbite autour de la planète géante, ont pris en compte cette découverte et se tiennent désormais prêtes à observer les deux nuages à partir de novembre 2019, lorsque la sonde aura une trajectoire propice. La mission européenne JUICE arrivera autour de Jupiter en 2029 et a parmi ses objectifs scientifiques principaux, la caractérisation des nuages neutres d’Europe.

Ressource complémentaire

Contacts IRAP

  • Quentin Nenon, IRAP, quentin.nenon@irap.omp.eu
  • Nicolas André, IRAP, nicolas.andre@irap.omp.eu

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