Le satellite Planck dévoile l’empreinte magnétique de notre Galaxie

Le satellite Planck dévoile l'empreinte magnétique de notre Galaxie

Le champ magnétique de la Voie Lactée vient d’être révélé dans une nouvelle carte livrée par la mission Planck de l’Agence spatiale européenne (ESA). Cette image est issue des premières observations sur l’ensemble du ciel de la lumière « polarisée » émise par la poussière interstellaire de notre Galaxie. De nombreux chercheurs et ingénieurs du CNRS, du CEA, du CNES et des Universités participent à la mission Planck qui continue sa moisson de résultats. Ces analyses viennent d’être soumises, dans quatre articles, à la revue Astronomy & Astrophysics.

La lumière est une forme d’énergie qui nous est très familière même si certaines de ses propriétés ne sont pas facilement accessibles. L’une d’entre elles – la polarisation – est une source d’informations pour les chercheurs. Dans l’espace, la lumière émise par les étoiles, le gaz ou la poussière peut être polarisée de plusieurs façons. En mesurant cette polarisation, les astronomes peuvent étudier les processus physiques qui sont à son origine, en particulier les propriétés des champs magnétiques dans le milieu interstellaire de notre Galaxie (1).

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Le champ magnétique de la Voie Lactée vu par le satellite Planck. Les régions les plus sombres correspondent à une émission polarisée plus forte et les stries indiquent la direction du champ magnétique projeté sur le plan du ciel. © ESA/collaboration Planck

La carte présentée ici a été obtenue en utilisant des détecteurs du satellite Planck, agissant un peu à la manière des lunettes de soleil polarisées, en version astronomique. Les tourbillons, boucles et arches de cette image tracent la structure du champ magnétique de notre Galaxie. Cette image dévoile l’organisation à grande échelle d’une partie du champ magnétique galactique. La bande sombre correspond au plan galactique : l’émission polarisée y est particulièrement intense. La structure générale révèle un motif régulier où les lignes du champ magnétique sont majoritairement parallèles au plan de la Voie Lactée.
Les observations révèlent également des variations de la direction de polarisation dans les nuages de matière proches du Soleil vus de part et d’autre de la bande sombre. Celles-ci témoignent de changements de la direction du champ magnétique dont les astrophysiciens étudient l’origine.
Les zones à haute latitude galactique ont été masquées. Le signal y est plus faible et un travail supplémentaire est requis pour mesurer et séparer la polarisation de notre Galaxie de celle du rayonnement fossile micro-onde.

Au-delà de notre Galaxie
L’intensité du rayonnement fossile de l’Univers a été cartographiée avec une précision sans précédent par Planck et aujourd’hui les chercheurs scrutent ces données pour mesurer la polarisation de ce rayonnement. C’est l’un des objectifs principaux de la mission Planck car cette polarisation pourrait révéler la présence d’ondes gravitationnelles primordiales générées juste après la naissance de l’Univers.
En mars 2014, les scientifiques de la collaboration BICEP2 ont annoncé la première détection d’un tel signal dans les données collectées par un télescope au sol observant une petite fraction du ciel (1%) à une seule fréquence. Leur résultat repose sur l’hypothèse que la polarisation de l’émission d’avant-plan de notre galaxie est négligeable dans cette région.
D’ici la fin de l’année 2014, la collaboration Planck livrera ses données obtenues à partir des observations du ciel complet dans les sept bandes en fréquence où les détecteurs sont sensibles à la polarisation de la lumière. Ces mesures multifréquences devraient permettre aux astrophysiciens d’estimer et de séparer le signal polarisé primordial et le signal d’avant-plan de notre Galaxie. Cette étude permettra une investigation bien plus détaillée du début de l’histoire du cosmos, depuis son expansion quand l’Univers était âgé d’une toute petite fraction de seconde jusqu’à la naissance des premières étoiles, plusieurs centaines de millions d’années plus tard.

La mission Planck en bref

Lancé en 2009, Planck, le satellite de l’Agence spatiale européenne (ESA) a observé l’ensemble de la voûte céleste dans neuf bandes de fréquence dans le domaine submillimétrique, entre l’infrarouge lointain et la radio. Les données de l’instrument haute fréquence HFI ont été essentielles pour ce résultat sur le champ magnétique. Cet instrument HFI, conçu et assemblé sous la direction de l’Institut d’astrophysique spatiale (CNRS/Université Paris-Sud) avec un financement du CNES et du CNRS a pris des données scientifiques du 13 août 2009 au 14 février 2012.
La contribution de la recherche française dans la mission Planck
La France est leader de l’instrument haute fréquence Planck-HFI dont les données sont essentielles pour les résultats cosmologiques mais également pour de nombreux résultats galactiques et extra-galactiques. Sa construction a coûté 140 millions d’euros et mobilisé 80 chercheurs de dix laboratoires du CNRS, du CEA et d’Universités. La France a assuré plus de 50% du financement de cette construction ainsi que 100% de celui du traitement de ses données : ce financement provient pour moitié du CNES, pour moitié du CNRS, du CEA et des Universités. Elle contribue également au financement de la mission elle-même via sa contribution financière au programme scientifique de l’ESA, soit 15% du coût de la mission.
L’exploitation des résultats scientifiques est majoritairement assurée par le CNRS, avec notamment Jean-Loup Puget (de l’IAS), « Principal Investigator », et François Bouchet (de l’IAP), « Co-Principal Investigator ». Les laboratoires français suivants ont été impliqués dans la construction puis dans l’analyse des données de l’instrument HFI (des mesures brutes aux cartes par fréquence), ainsi que dans l’interprétation astrophysique et cosmologique de l’ensemble des données de la mission Planck :

  • APC, AstroParticule et cosmologie (Université Paris DiderotlCNRSlCEAlObservatoire de Paris), à Paris.
  • IAP, Institut d’astrophysique de Paris (CNRSlUPMC), à Paris.
  • IAS, Institut d’astrophysique spatiale (Université Paris-SudlCNRS), à Orsay.
  • Institut Néel (CNRS), à Grenoble.
  • IPAG, Institut de planétologie et d’astrophysique de l’Observatoire des sciences de l’Univers de Grenoble (CNRSlUniversité Joseph Fourier), à Grenoble.
  • IRAP, Institut de recherche en astrophysique et planétologie de l’Observatoire Midi-Pyrénées (Université Paul SabatierlCNRS), à Toulouse.
  • CEA-IRFU, Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers du CEA, à Saclay.
  • LAL, Laboratoire de l’accélérateur linéaire (CNRSlUniversité Paris-Sud,), à Orsay.
  • LERMA, Laboratoire d’étude du rayonnement et de la matière en astrophysique (Observatoire de ParislCNRSlENSlUniversité Cergy-PontoiselUPMC), à Paris.
  • LPSC, Laboratoire de physique subatomique et de cosmologie (Université Joseph-FourierlCNRSlGrenoble-INP), à Grenoble.
  • CC-IN2P3 du CNRS, Centre de calcul de l’Institut national de physique nucléaire et de physique des particules (IN2P3) du CNRS.

Pour aller plus loin

Notes :

(1) La connaissance du champ magnétique de notre galaxie est fondamentale car celui-ci est soupçonné de gouverner ou d’influer sur de nombreux phénomènes, tels que la trajectoire des particules chargées électriquement (les rayons cosmiques) et la formation des étoiles.

Références :

Les quatre articles, dont les auteurs sont les membres de la collaboration Planck, ont été soumis à Astronomy & Astrophysics :

Contact IRAP

Jean-Philippe Bernard l T 05 61 55 75 38 l Jean-Philippe.BernardSPAMFILTER@irap.omp.eu

Autres personnes de l’IRAP impliquées

D. Alina, T. Banday, K. Ferrière, M. Giard, T. Jaffe, L. Montier, I. Ristorcelli, A. Sauvé

Auteur : [entrer nom prenom de l’auteur]

Date : 06/05/20142014/05/06

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