4 juillet 2016 : La sonde Juno a rendez-vous avec Jupiter

La mission Juno

Juno est une mission spatiale de la NASA qui a pour objectif l’étude de la planète Jupiter. La structure de cette planète géante gazeuse, son mode de formation mais aussi le fonctionnement de son environnement magnétisé, au lancement de la mission, sont loin d’être clarifiés malgré plusieurs missions spatiales et les observations astronomiques faites depuis la Terre. La sonde spatiale, lancée en 2011, doit collecter sur place des données sur les couches internes de Jupiter, la composition de son atmosphère et les caractéristiques de sa magnétosphère. Ces éléments doivent permettre de reconstituer la manière dont Jupiter s’est formée et de corriger ou d’affiner le scénario de formation des planètes du Système solaire dans lequel Jupiter a, du fait de sa masse importante, joué un rôle majeur, et de préciser la dynamique de sa magnétosphère, archétype des systèmes magnétisé en rotation rapide.

A partir du 4 juillet la phase scientifique de la mission débutera. Juno doit réaliser ses observations à partir d’une orbite polaire très elliptique d’une période de 11 jours qui fait passer la sonde à très basse altitude au-dessus de la planète de pôle en pôle en évitant en grande partie la ceinture de radiations très intense susceptible de l’endommager. La mission doit durer au moins une année au cours de laquelle Juno réalisera 37 survols de la planète.

Juno emporte huit instruments scientifiques dont deux spectromètres, un radiomètre, un magnétomètre et un ensemble d’instruments dédiés à l’étude des pôles de Jupiter. Juno est la première sonde spatiale à destination d’une planète externe qui utilise des panneaux solaires au lieu de générateurs thermoélectriques à radio isotope. Juno est la deuxième mission du programme New Frontiers qui regroupe des missions d’exploration du Système solaire nécessitant un budget moyen. Son coût total est de 1,1 milliard de dollars.

Objectifs

Juno a pour objectif de reconstituer l’histoire de la formation de Jupiter et son évolution, et de préciser le fonctionnement de sa magnétosphère, connue pour générer les aurores polaires les plus puissantes du Système Solaire. Compte tenu du rôle joué par la planète géante dans la formation du Système Solaire, les éléments obtenus doivent permettre d’affiner les théories dans ce domaine et de mieux comprendre les systèmes planétaires découverts autour d’autres étoiles. Malgré les données recueillies par les astronomes et les sondes spatiales qui ont précédé Juno, à la date de lancement de la sonde, Jupiter reste une planète mal connue. Juno doit permettre d’effectuer des observations permettant de répondre aux points suivants :

  • son mode de formation ;
  • la proportion d’eau et d’oxygène présente ;
  • sa structure interne ;
  • la manière dont les différentes strates de la planète se déplacent les unes par rapport aux autres ;
  • la présence d’un noyau solide et sa taille ;
  • la manière dont le champ magnétique est généré ;
  • la relation existant entre les déplacements des couches atmosphériques et les mouvements internes de la planète ;
  • les mécanismes à l’origine des aurores polaires ;
  • les caractéristiques des zones polaires.

La sonde doit rechercher des informations sur plusieurs thèmes importants :

  • La composition de l’atmosphère
  • La structure de l’atmosphère
  • Le champ magnétique
  • La magnétosphère au niveau des pôles
  • Le champ de gravité

Équipements scientifiques

Juno emporte huit ensembles d’instruments comprenant en tout 29 capteurs ainsi que la caméra (JunoCam). Ces instruments comprennent un radiomètre à micro-ondes (MWR) destiné à sonder les couches profondes de l’atmosphère de la planète, un magnétomètre (MAG) chargé de mesurer le champ magnétique interne et externe et une expérience de mesure de la gravité par ondes radio (GS, Gravity Science) pour établir la structure interne de Jupiter. Enfin cinq instruments sont plus particulièrement dédiés à l’étude de la magnétosphère et des aurores polaires : un spectromètre infrarouge (JIRAM), un spectromètre ultraviolet (UVS), un détecteur d’ ondes de plasma et d’ ondes radio (WAVES), l’instrument de détection des particules énergétiques (JEDI) et ‘thermique’ (JADE). C’est principalement à cette expérience que les équipes de l’IRAP ont contribué, en particulier pour les trois spectromètres électrons (vue ci-dessous).

Liens externes

La planète Jupiter

Jupiter est la plus grosse des planètes du Système solaire avec une masse qui représente deux fois et demi celle de l’ensemble des autres planètes et un diamètre qui est plus de 11 fois celui de la Terre (environ 138 000 km). Elle fait partie des planètes externes du Système solaire comme SaturneUranus et Neptuneet est également une planète gazeuse géante. Jupiter est composée essentiellement d’ hydrogène et d’ hélium, comme le Soleil, avec sans doute un noyau central rocheux d’une masse équivalente à dix fois celle de la Terre. La planète tourne sur elle-même en un peu moins de 10 heures. Située à 5,2  unités astronomiques du Soleil, elle boucle son orbite autour du Soleil en 11,9 années terrestres. Jupiter dégage plus de chaleur qu’elle n’en reçoit du Soleil : le refroidissement de la planète entraîne une lente contraction de celle-ci qui génère en retour un échauffement localisé dans son cœur. Cette chaleur est transportée par convection jusqu’à la surface de la planète et est sans doute responsable des mouvements complexes et violents agitant l’ atmosphère de Jupiter. Celle-ci, d’une épaisseur de 5 000 km, est formée de 3 couches : jusqu’à 100 km de profondeur, des nuages de glace d’ ammoniac, vers 120 km, des nuages d’ hydrogénosulfure d’ammonium et à partir de 150 km de profondeur, des nuages d’eau et de glace. À une profondeur plus importante, l’hydrogène soumis à une pression énorme se transforme en hydrogène métallique qui conduit l’ électricité comme un métal. Les mouvements au sein de ce liquide métallique sont sans doute à l’origine du champ magnétique intense de la planète,(le moment magnétique de Jupiter est 20000 fois celui de la Terre !) qui piège les électrons et les ions créant une ceinture de radiationsparticulièrement puissante. La magnétosphère de Jupiter, c’est-à-dire la zone de l’espace placée sous l’influence de ce champ magnétique, s’étend jusqu’à 3 millions de kilomètres dans la direction du Soleil et jusqu’à 1 milliard de kilomètres dans la direction opposée. Si elle était visible, elle aurait la taille apparente de la pleine lune. Jupiter comprend 67 satellites naturels. Les quatre principaux IoEuropeGanymède et Callisto figurent parmi les plus gros satellites naturels du Système solaire et présentent des caractéristiques remarquables : activité volcanique intense dans le cas de Io, présence supposée d’océans composés d’eau liquide en dessous de la surface pour Europe et Ganymede. Jupiter, du fait de sa masse, a joué un rôle très important dans le processus de formation des autres planètes du Système solaire et donc de la Terre, en agissant notamment sur leurs orbites et en contribuant à nettoyer progressivement le Système solaire des corps célestes mineurs susceptibles de les percuter.

Un scénario de formation mal défini

La sonde atmosphérique lancée par Galileo dans l’atmosphère de Jupiter a relevé des proportions d’éléments chimiques qui remettent en question les hypothèses sur la formation de la planète et en conséquence les théories établies sur les origines et l’évolution du Système solaire 11 :

  • Hypothèses et interrogations en 2011 sur la structure interne de Jupiter. Jupiter semble pauvre en eau alors que selon les théories en vigueur celle-ci est considérée comme un médium indispensable pour l’incorporation des éléments lourds lors de la formation des planètes du système Solaire externedont fait partie Jupiter. Or ces éléments abondent sur Jupiter. La réponse qui sera apportée à cette question aura des répercussions sur le scénario de formation des planètes aux caractéristiques proches de celles de la Terre.
  • Deux scénarios s’affrontent sur la manière dont la planète Jupiter s’est formée : selon le premier scénario, la planète s’est formée en deux temps – accrétion de matériaux situés dans son voisinage jusqu’à former un noyau solide représentant une dizaine de masses terrestres puis effondrement gravitationnel de la masse de gaz et de poussière entourant la planète ; le deuxième scénario repose sur le seul effondrement gravitationnel d’un nuage de poussières et de gaz mais nécessite la présence d’une nébuleuse originelle de plus grande taille que celle retenue dans les scénarios de formation du Système solaire. La confirmation de la présence d’un noyau solide au cœur de Jupiter et la détermination de sa composition pourraient permettre de trancher.
Hypothèses et interrogations en 2011 sur la structure interne de Jupiter.

Les missions antérieures

À partir de 1973, plusieurs sondes spatiales ont effectué des manœuvres de survols qui les ont placées à portée d’observation de Jupiter.

L’exploration spatiale de Jupiter débute tardivement car l’envoi d’une sonde spatiale vers cette planète, située à 5 unités astronomiques du Soleil, nécessite le recours à une fusée puissante L’exploration des planètes extérieures, dont fait partie Jupiter, ne débute qu’en 1973, alors que les planètes intérieures ont déjà reçu à l’époque la visite de plusieurs dizaines de sondes spatiales. Plusieurs engins spatiaux vont survoler Jupiter par la suite mais seule Galileo effectuera un séjour prolongé après s’être mise en orbite autour de la planète.

  • 1973 : La première sonde à approcher Jupiter est Pioneer 10 qui passe à une distance de 130 000 km de la planète le 3 décembre 1973 et découvre sa ceinture de radiations.
  • 1974 : Pioneer 11 survole à son tour Jupiter (distance 34000km). Malgré leur instrumentation très simple, les deux sondes révèlent la complexité de l’atmosphère de Jupiter, fournissent des images d’une très grande qualité ainsi que les premières données sur la magnétosphère de la planète.
  • 1979 : Les sondes Voyager 1 et 2, respectivement 349 000 km et 570 000km, dotées d’une instrumentation scientifique beaucoup plus importante, effectuent leur survol de la planète. Elles découvrent les anneaux ténus qui entourent Jupiter, plusieurs lunes nouvelles ainsi que l’activité volcanique à la surface de Io.
  • 1992 : Ulysses étudie la magnétosphère de Jupiter (distance 409 000km).
  • 1995 : La sonde Galileo orbite autour de Jupiter pour la première fois. Elle atteint Jupiter en décembre et entame alors une mission d’exploration d’une durée de 8 ans. Malgré une antenne paraboliquegrand gain défectueuse affectant fortement la quantité de données pouvant être transmise, Galileo parvient à transmettre des informations sur l’ensemble du système jovien. Au début de sa mission scientifique Galileo lâche une petite sonde atmosphérique qui pénètre l’ atmosphère de Jupiter et fournit la composition élémentaire des couches supérieures de celle-ci avant d’être écrasée par la pression. Les données recueillies remettent en cause une partie des théories admises sur le processus de formation des planètes du Système solaire, avec la découverte d’une très faible proportion d’eau dans l’atmosphère. Les équipes de l’IRAP travaille toujours à l’exploitation scientifique de cette mission.
  • 2000: la sonde Cassini (distance 10 000 000 km), en route pour Saturne, survole Jupiter : elle prend des images à haute résolution de la planète et en coordination avec la sonde Galileo étudie sa magnétosphère très étendue ainsi que ses interactions avec le vent solaire. L’intensité de la ceinture de radiations est mesurée avec plus de précision et se révèle beaucoup plus élevée que prévu. Ces informations sont utilisées pour dimensionner les protections de la sonde Juno. L’IRAP est contributeur direct de 2 instruments de la mission et participe à l’analyse des données de tous les instruments ‘magnétosphère’.
  • 28 février 2007 : la sonde New Horizons est la dernière à survoler Jupiter. La sonde observe des éclairs aux pôles, la création de nuages d’ ammoniac et étudie la circulation des particules chargées dans la queue magnétique de la planète.

Les missions futures

2022 mission JUICE :future mission de l’agence Spatiale Européenne, JUICE sera lancée depuis le port spatial de Kourou pour un voyage de 8 ans, une arrivée programmée en 2030, pour 3 ans d’observations détaillées.

JUICE étudiera en continu l’atmosphère et la magnétosphère de Jupiter, ainsi que les interactions de ses lunes avec la géante gazeuse. Elle visitera Callisto, objet du Système solaire qui comporte le plus grand nombre de cratères, et effectuera deux survols d’Europa. JUICE mesurera pour la première fois l’épaisseur de la croute glacée d’Europa et recensera des sites adaptés à une future exploration in situ. Le satellite se mettra ensuite en orbite autour de Ganymède en 2032, d’où il étudiera la surface glacée et la structure interne de cette lune, ainsi que son océan de subsurface. Ganymède est la seule lune du Système solaire à générer son propre champ magnétique et JUICE observera en détail les interactions magnétiques et plasmiques sans équivalent de ce champ avec la magnétosphère jovienne.

JUICE nous donnera un meilleur aperçu de la façon dont se forment les géantes gazeuses et les mondes qui gravitent autour, ainsi que de leurs possibilités d’abriter de la vie. L’IRAP participe aux suites instrumentales ‘ondes’ et particules.

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